LA BATAILLE DE LA MARNE VUE PAR CHARLES LE GOFFIC
CHAPITRE VII
L'AUBE DE LA VICTOIRE
Le bruit courut cependant que Moussy, le futur héros d'Ypres, avec une division du IXe corps, avait culbuté la Garde dans les marais de Saint-Gond, et des historiens se firent l'écho de ce bruit. A la rigueur, il n'y aurait rien eu là d'impossible. De Broyes et de Mont-Chalmont, nos 75 tenaient sous leur feu les sept routes des marais, si rectilignes, Si géométriques, que, d'une rive à l'autre, on peut les prendre d'enfilade; sur presque tout le parcours de ces routes, les Allemands ne pouvaient s'écarter d'un mètre à droite ou à gauche, sous peine d'être happés par la tourbière, et, si notre artillerie avait été en action, ils n'auraient eu le choix, en effet, qu'entre l'extermination sur place ou l'enlisement. Pourquoi notre artillerie n'est-elle pas intervenue ? Les munitions, comme on l'a supposé, lui manquèrent-elles au dernier moment ? Nos services de renseignements aériens, si actifs pendant la bataille, connurent-ils quelque défaillance vers sa fin ? (Ils en connurent si peu que c'est eux qui nous prévinrent à cinq heures et demie du repli allemand, commencé bien avant pour certains éléments de von Bülow. Le Memento paroissial de Vertus nous apprend en outre que, vers deux heures, le 9, un avion français survola entre Bergères et Vertus : " C'est Brindejonc des Moulinais qui, sur les stationnements ennemis, prépare un coup de maître; ses projectiles foudroient une dizaine d'hommes et environ quarante chevaux. La riposte ne se fait pas attendre, mais n'atteint pas le hardi pilote qui regagne le sud ." V. à l'Appendice l'extrait du Journal de bord de Brindejonc)
La vérité est plus simple : ce qui s'était passé pour l'armée Maunoury se passa pour la 9e armée. On sait que la 6e armée, le matin du 10 septembre, au moment où elle allait reprendre l'offensive par son extrême gauche, ne trouva, dit M. Babin, " à peu près plus rien devant elle; pendant la nuit, l'ennemi s'était écoulé sans bruit vers le nord, à l'est de l'Ourcq, en se couvrant par de solides arrières-gardes. Il en fut tout pareillement de l'armée von Bülow et d'une partie de l'armée von Hausen. " Le soir du 9, écrit le sous-lieutenant M... (Courrier de Sézanne du 10 septembre 1915. Cf. aussi Henri LIBERMANN, op. cit. " C'est le vide, le vide immense. On butte sur des cadavres on réveille d'un heurt des douleurs endormies. Pas un coup de feu, pas un ennemi... "), nous étions à Linthes, et je fus placé en grand-garde avec ma compagnie pour y protéger le débarquement de la 42e division, qui arrivait à la rescousse. Il n'était que temps. Le lendemain nous nous portions en avant et, à notre grande surprise, nous constations que les Allemands n'étaient plus là. C'était le 10 au matin. "
Devant Mondement même et Saint-Prix, les voies étaient dégagées. Jusqu'au matin du 10, elles avaient été remplies par des défilés de troupes dont la sourde cadence martelait le silence nocturne. Les habitants réfugiés dans les grottes ne savaient comment interpréter ces évolutions. " Les troupes passent, écrit M. Roland. Vont-elles ou reviennent-elles? On ne sait. Les bâtiments du château de Mondement flambent. Une maison brûle dans la direction de Broussy; des lueurs d'incendie partout, à Villeneuve, Royes, Reuves, etc. Le canon français lance encore quelques obus à intervalles plus espacés, puis tout retombe dans le silence de la nuit... Le lendemain, à cinq heures et demie, au jour, même silence. "
Et, comme ce silence continue, nos troglodytes finissent par risquer un oeil au dehors. Justement voici le petit vacher qui les ravitaille chaque matin. Ils l'interrogent avidement : l'enfant leur confirme qu'il n'y a plus de Boches "à l'horizon ". La bataille est finie. Sur quoi, ils quittent leur cachette à la file indienne, par les vignes, descendent vers le village; mais, au tournant de la rue du Grand-Puits, ils tombent sur une douzaine d'Allemands qui remontent en silence vers Congy et dont le chef, qui " porte un tambour sur le dos et un brassard de la Croix-Rouge sur la manche ", demande en bon français à l'instituteur où se trouve le 164e régiment [d'infanterie allemande]. M. Roland répond que le 164e cantonnait au village. " Tout le régiment n'y était pas ", réplique l'officier qui, sans insister, continue son chemin.
C'étaient les derniers traînards du Xe corps de l'armée von Bülow, des grand-gardes sans doute et des infirmiers qu'on n'avait pu prévenir à temps de la retraite, tellement elle avait été précipitée (Un civil français que les Allemands emmenaient avec eux, M. Prévot, secrétaire de la mairie de Fère, nous disait que, malgré son grand âge, on lui imposa dans la nuit du 9 au 10 une traite de 40 kilomètres dans la direction d'Aulnizeux. Cette arrestation de M. Prévost a donné lieu elle-même à bien des fables. Un journal de la Marne a raconté notamment que des officiers d'état-major [allemands] venaient d'occuper l'hôtel de ville. " Soudain ils s'immobilisent, médusés. Devant eux, visage souriant, s'avançait un personnage auguste : le secrétaire de la mairie, M. Prévost, qui ressemble trait pour trait à M. Poincaré. Sans plus s'informer, les officiers télégraphient, téléphonent aux quatre points cardinaux. Le kronprinz lui-même est avisé de la capture. L'erreur ne fut reconnue que plus tard, mais le malheureux secrétaire la paya de sa liberté. " La réalité est bien différente et M. Prévost nous dit qu'il fut simplement arrêté parce que deux horloges de la ville, à quelques heures d'intervalle et la seconde dans la nuit, s'étaient avisées de sonner. Toujours soupçonneux, les Allemands virent là un signal et arrêtèrent M. Prévost qui, transporté à Cassel, puis au château de Hassenberg [Saxe-Cobourg], ne fut rendu à la liberté que le 24 mars 1915. Pendant la bataille et après, il dut accompagner à pied les troupes prussiennes, exposé aux mêmes feux et soumis, sans égard pour ses cheveux gris, aux mêmes marches épuisantes).
Cinq minutes plus tard, un peloton de cuirassiers français pénétrait dans le village. La population acclamait ces premiers et rayonnants messagers de la victoire. Droits sur l'arçon, la crinière flottante, ils arrivaient, dans un poudroiement d'or, par la route d'Oyes. L'instituteur leur fit part de la rencontre précédente.
- Si vous étiez arrivés cinq minutes plus tôt, leur dit-il, vous les cueilliez.
- On les aura, répondirent-ils, et ils piquèrent des deux.
Mais, presque partout, l'ennemi avait une étape d'avance sur nous et ses arrière-gardes étaient fortement organisées. Aux deux extrémités des marais, à Morains-le-Petit, que la 33e brigade, par Nozet (" Mercredi 9 septembre [au soir]... en avant, 90e, 68e atteignent Nozet - Carnet de campagne du général Moussy - La 33e brigade était partie sans attendre d'être ravitaillée, tant elle brûlait de rattraper l'ennemi. C'est à elle que revint l'honneur d'avoir repris la première contact avec lui. On se souvient qu'elle était à minuit au Nozet, après avoir nettoyé à la baïonnette les bois environnants. De la ferme il ne restait que quelques murs calcinés. " Dans la cave, nous écrit le soldat Elie C..., on trouva plusieurs cadavres boches, dont un entièrement nu, à cheval sur une barrique. On suppose que c'était le cadavre d'un officier, car [c'est le bruit qui courait alors] les soldats avaient ordre de dépouiller de leurs vêtements leurs officiers trouvés ivres-morts; on voulait sans doute sauver l'honneur de la caste prussienne. Rappelons que le 135e et un bataillon du 68e étaient restés en réserve, avec Moussy et le colonel Genot, près de Linthes, et ne furent mis qu'assez tard au courant de la rapide progression du colonel Simon vers Morains.), Puits et les hauts de Fère, atteignait le 10 vers cinq heures et demie du matin (On pousse sur Morains-le-Petit où 68e et 90e arrivent cinq heures et demie - Carnet de campagne du général Moussy -), et à Saint-Prix, où la division marocaine s'engageait presque à la même heure, il lâchait pied incontinent. A Morains, c'était l'effet de la surprise : assailli à l'improviste par le colonel Simon, qui, dans la fièvre de la poursuite, sans considérer que le reste de la 17e division était encore très échelonné, s'était jeté sur lui et avait enfoncé ses lignes, il détalait devant les lattes du capitaine Thomassin, lancé à ses trousses avec un demi-escadron du 7e hussards; à Saint-Prix, il avait simplement essayé de couper la route par une barricade de peupliers, mais, au lieu de s'abattre au travers du chemin, dit l'abbé Néret, "les grands arbres de France, comme conscients de leur rôle, s'écroulèrent de chaque côté de la rivière " et nos troupes passèrent; Elles étaient moins heureuses à l'est des marais, à Pierre-Morains et à Ecury-le-Repos notamment, où un bataillon du 347e de ligne se heurtait vers quatre heures du soir à une forte arrière-garde saxonne qui lui démolissait trois officiers, dont son commandant, et 250 hommes (" Vers quatre heures [du soir], nous allions arriver à Ecury-le-Repos, quand notre régiment se heurta à une forte division d'arrière-garde saxonne qui nous empêcha de passer après avoir tué un officier et une cinquantaine d'hommes, blessé le chef de bataillon, 2 capitaines, 200 ou 300 hommes. , Lettre du sous-lieutenant Firmin M..., dans le Courrier de Sézanne du 10 septembre 1915. Cf. aussi le Carnet de campagne du général Moussy : " La 52e D. R. ne peut enlever Ecury. Action infructueuse de cinq heures à sept heures et demie sur Pierre-Morains (68e) et Ecury (90e). Repli sur Morains. Couché à la station sur la paille. Ai eu froid, froid. " Et, plus loin, à la date du 11: " A Vertus,... nouvelles du général Leleu, qui attaquait Pierre-Morains en même temps que nous, hier, et qui faillit recevoir nos projectiles "); une seconde tentative, exécutée au commencement de la nuit par le lieutenant-colonel de Salins, avec un élément de la 103e brigade, coûtait la vie au capitaine d'Annoville, victime d'une ignoble ruse allemande (Les Archives cantonales de Vertus racontent ainsi le fait : Ordre est donné [au 348e de la 103e brigade] de tenter une attaque de nuit sur les tranchées qui bordent le village. Le commandant Cody prend la tête du 6e bataillon; le capitaine d'Annoville part avec le 5e . Les deux sections devaient se rejoindre. Vers neuf heures du soir, M. d'Annoville perçoit le bruit d'une colonne en marche, puis une voix correctement française : " Halte là! Qui vive? " Persuadé qu'il était en face de ses frères, le capitaine répond : " France! N'êtes-vous pas le 6e bataillon? , Et la même voix de reprendre: " Avance au ralliement. Pas tous à la fois, un seul. " Le capitaine n'hésite pas; il avance en criant : " Qui vive? " La voix répond : " France, patrouille. " Et, au même moment, un feu de salve éclate. Le capitaine, trois fois blessé, tombe foudroyé ; ses hommes reculent sous une fusillade intense. ") : la 52e division de réserve dut rétrograder sur Morains-le-Petit ; la 33e brigade s'y était déjà rassemblée en formation articulée, et la poursuite, de ce côté, fut momentanément suspendue.
Sur la Maurienne et la Vaure, en revanche, où opérait la magnifique 42e division, lancée dans le flanc de von Hausen, elle ne subissait aucun arrêt et talonnait étroitement l'ennemi jusqu'à la Somme : la 84e brigade marchait en tête; le 162e le long de la route Linthes-Fère-Champenoise; le 151e à travers champs dans la direction d'OEuvy, qu'il laissait à sa droite; la 83e brigade derrière la 84e ; le régiment de cavalerie divisionnaire sur l'itinéraire Corroy-Connantray-Lenharrée. On entrait dans la haute plaine fertonne, cimetière du XIe corps, et l'on eût dit qu'à l'approche de la 42e division cet immense charnier se fût mis à palpiter d'une vie sourde : le sol remuait, comme s'il avait entendu le pas de nos troupes; à la lisière des bois, des formes confuses sortaient de l'ombre et rampaient dans notre direction, criant " A l'aide!…A boire !... Nous sommes là depuis trois jours !... " C'étaient les blessés de la surprise du 8, que l'ennemi n'avait pas pris la peine de relever et qu'il laissait agoniser dans ces déserts, où les tortures de la soif achevaient l'oeuvre des mitrailleuses. La plaine, à perte de vue, était bosselée de cadavres en décomposition. Par cette chaude matinée de septembre, terne, pluvieuse, mais sans un souffle, ils empestaient l'air au point de donner la nausée aux coeurs les plus solides. Boichut confesse qu'il eut le " mal de mer " à OEuvy; Deville parle de l'impression " dantesque " qu'il emporta du champ de bataille de Normée. Des débris humains pendaient jusque dans les arbres. Les acclamations des survivants en apprenant notre victoire, leur joie de nous retrouver, de recevoir nos soins, leur fièvre à nous conter les incidents lugubres ou sublimes de la surprise, dissipèrent peu à peu ce cauchemar. On identifiait à la corne d'un boqueteau la dépouille du colonel Mèzière; un caporal du 32e , la jambe cassée, arrêtait le colonel Deville devant le corps d'un autre officier.
- Regardez, mon colonel. C'est le commandant Humbert... Il est tombé, une balle dans le dos, en essayant d'organiser le repli... et il m'a demandé de le tourner vers le nord, afin d'avoir l'honneur de mourir face aux Allemands.
Jusqu'a onze heures du matin, aucun autre incident n'avait troublé la marche de nos troupes, quand une division allemande du XIIe corps de réserve, dont l'artillerie s'était postée derrière la Somme, déclencha brusquement un violent tir de barrage sur la lisière des bois, la ligne du chemin de fer et la station de Normée. Le 162e se déployait aussitôt, son chef le commandant Moisson sur la route, avec le colonel Trouchaud; le 151e à la Fontaine-d'ivoire, le bataillon de Boutain en soutien du 162e ; l'artillerie divisionnaire en batterie vers la cote 172, à 2 kilomètres de Connantray, les deux groupes du 46e face à Normée, à droite et à gauche de la route de Fère. Jusqu'à deux heures trente l'attaque ne put déboucher. A ce moment, persuadé qu'une concentration nouvelle de ses feux allait lui permettre de briser la résistance allemande, Grossetti donnait l'ordre à la 42e division de s'avancer en trois colonnes dans la direction de Villeseneux-Soudron. Il devait revenir peu après sur cet ordre. Mais l'estafette, chargée d'en aviser la colonne Deville, était arrêtée en chemin; le 151e , se conformant à l'ordre précédent, traversait la Somme à Lenharrée, que l'ennemi avait négligé de garder, et poussait à travers bois, dans la nuit, sur Villeseneux, alors que les colonnes Krien et Trouchaud étaient toujours immobilisées devant Normée et la 60e division de réserve devant Sommesous. Il avait passé sans le savoir entre deux batailles. Il se replia quand il s'en aperçut. La légende (Mais est-ce une légende et ne s'agit-il pas encore ici de l'ubiquiste Eitel ? V. à l'Appendice:la Surprise de Villeseneux.) veut qu'un des fils du kaiser se trouvât parmi les troupes qu'il avait devant lui et qui, croyant leurs derrières tournés, se hâtèrent de déguerpir. Normée, Villeseneux, Soudron, au matin, étaient vides. Et la poursuite reprenait sur toute la ligne, s'étendant à notre flanc-garde qui était rentrée dans Mailly dès le soir du 9 avec la brigade de Sailly (Il semble que, contrairement à ce qui nous avait été affirmé, la brigade de Sailly ne soit entrée à Mailly que le 10 au matin et se soit contentée la veille d'une simple démonstration. " Toute la journée, nous écrit-on, nous avions subi sur le plateau de l'Arbre-de-Justice une grosse canonnade de 150 plus impressionnante qu'efficace. Vers 15 heures, une infanterie ennemie sortant de Mailly nous avait fait reculer de 3 à 4 kilomètres. Une heure plus tard, un officier, le sous-lieutenant Fauquet, du 24e dragons, apportait du général Foch au général de l'Espée l'ordre de reprendre l'offensive. Celui-ci porta en avant la brigade de Sailly et la batterie d'Hangouwart qui canonna Mailly à la nuit tombante. Puis toute la division se retira fort loin, au Chêne, près d'Arcis-sur-Aube, et ce ne fut que le 10 au matin que nous rentrâmes à Mailly. "), tandis que la brigade de Séréville, qui avait appuyé la veille l'attaque de de Langle sur Sompuis, rejoignait ses anciennes positions. Si, le 10 au soir, de l'Espée n'avait pas dépassé Poivres-Sainte-Suzanne, c'est qu'il y attendait la division de Mitry, placée sous ses ordres. Quelques heures furent perdues là qu'on aurait pu mieux employer. Sommesous, Soudé-Sainte-Croix n'étaient pas encore dégagés. Le 11 enfin, au petit jour, rassemblée sous le commandement du général de Séréville, la 9e division de cavalerie, moins la brigade de Sailly, que de l'Espée avait gardée à Poivres, sonnait le boute-selle et partait pour cette randonnée de quarante-huit heures, sans débrider; qui devait se terminer le 13 devant Souain, après la prise des ponts de la Marne par le 5e cuirassiers (Sommesous, qu'attaquait la 60e division de réserve, étant toujours aux mains de l'ennemi, c'est sur Soudé-Sainte-Croix que s'était porté le premier effort de Séréville. Il en chassait l'ennemi à 10 heures, ce qui dégageait Sommesous. Sur la prise même des ponts de la Marne et ses incidents, voir pour plus de détails à l'Appendice.)
Si méthodique, d'ailleurs, qu'eût été le repli de l'armée von Bülow et de l'aile droite saxonne, il n'avait pu s'opérer sans d'énormes sacrifices d'hommes et de matériel. Le temps lui manquant pour enlever ses blessés et ses morts de la journée, déjà rangés en longues files le long des routes, l'ennemi les avait tout simplement abandonnés. Sur la route d'Oyes à Villevenard, ils formaient ainsi une longue allée funèbre; devant le prieuré de Saint-Gond, un jeune Allemand était tombé au moment où il faisait sa toilette et il avait encore sa petite glace de poche à côté de lui. Ces morts, ces blessés, des ambulances entières avec leur section sanitaire au complet, comme celle de Lenharrée, " pleine de soldats allemands, fantassins, artilleurs, garde impériale " (Quatre cent cinquante hommes au total. [Lettre d'un major français écrite de Connantray le 14 et citée par l'abbé Néret] ) A Congy, dans l'ambulance du château, on trouvait à peu prés autant de blessés allemands; à Bayes, leur chiffre passait cinq cents, etc.), des batteries culbutées, des caissons démontés, des prolonges d'artillerie encastrées dans des culées de pont, des monceaux d'obus qu'on n'avait pas eu le temps d'emporter et un extraordinaire entassement de fusils, de gibernes, de cartouches, de havresacs, d'objets de pansement, de paquets de correspondance, de boîtes de conserves, de quartiers de viande avariée, de bouteilles de champagne vides et même de pièces d'appareils cinématographiques, ce fut, avec les inévitables traînards que laisse derrière elle une armée en retraite, tout le butin de cette première journée. Il devait s'enrichir singulièrement par la suite. Et il est possible en outre qu'au cours de la retraite les marais aient englouti quelques égarés, mais ils ont gardé leur secret jusqu'ici, et nulle part, que je sache, des faucheurs n'ont entaillé de leurs lames des cadavres qui émergeaient à demi du limon (Florian PARMENTIER, Visions de guerre).
C'est que les Allemands connaissaient les marais mieux que nous: depuis des années, sous couleur d'y chasser les halbrans ou de placer des engrais chimiques dans les fermes, leurs espions les battaient en tous sens; certains même, déguisés en bergers, en employés de fromagerie, en marchands de coupes ambulants, en pousseurs de petites voitures de Caïffa, vivaient dans l'intimité des habitants et, la guerre venue, le masque jeté, mirent une sorte de plaisir sadique à se faire reconnaître de leurs dupes ( Voir à l'Appendice les Espions).
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