LA BATAILLE DE LA MARNE VUE PAR CHARLES LE GOFFIC

CHAPITRE VIII

EPILOGUE

Les marais de Saint-Gond, tombeau de la Garde prussienne, la formule était saisissante sans doute et faisait image pour la foule (Est-il besoin de dire que nulle part, ni dans les communiqués, ni dans le rapport, plus détaillé, sur l'ensemble des opérations du 2 août au 2 décembre 1914, il n'est fait la moindre allusion à l'enlisement de la Garde ? Le probe historien qu'est M. Babin n'en souffle mot; les auteurs de la Guerre en Champagne n'en parlent que pour mémoire et comme d'une légende qui ne supporte pas l'examen. On aurait aimé trouver chez tous la même discrétion). Mais la réalité est cent fois plus belle que la légende. Ce qui s'est enlisé là, ce qui a sombré définitivement dans cette fosse verdâtre, c'est mieux que quelques bataillons d'élite, c'est le prestige de la force allemande et de sa prétendue invincibilité. Au bord du plateau où se cramponnaient nos troupes, dans la Marne, près d'Esternay, un riche et pur château du dix-huitième siècle porte le nom symbolique de Réveillon : est-ce ce nom, une terre chargée d'histoire, l'obscur pressentiment des revanches de l’avenir, ou tout cela peut-être en même temps qui inspira Detaille ? Quoi qu'il en soit, le Rêve, la plus émouvante et la plus populaire de ses toiles, est né à Réveillon, pendant l'été de 1887 (Detaille y recevait l'hospitalité d'une autre artiste célèbre, Mme Madeleine Lemaire, dont la fille, artiste distinguée elle-même, Mlle Suzanne Lemaire, voulait bien nous écrire : " C'est exactement entre Villeneuve-la-Lionne et Joisille que Detaille se faisait conduire chaque matin, avant l'aube, par notre garde Joyeux, qui lui allumait là un grand feu, dans les lueurs duquel, selon votre émouvante idée, s'esquissait peut-être déjà l'ébauche d'une victoire future...). Regardez-la bien : des soldats qui dorment, les faisceaux formés, sur un grand plateau nu où des feux de bivouac achèvent de se consumer. C'est, de toute évidence, le plateau champenois. Mais ne semble-t-il pas qu'au dernier plan de l'horizon, à la lisière du plateau, commence une zone de brume mystérieusement teintée d'aurore ? Et, sans trop de complaisance, n’est-il pas permis d'y reconnaître les brouillards héroïques de ces marais de Saint-Gond, au milieu desquels, vingt-sept ans plus tard, par la constance inébranlable de Foch aux prises avec les corps les plus fameux de toute l'Allemagne, la Victoire de la Marne devait secouer ses ailes et rouvrir le cycle fermé des grandes Gestes françaises ?

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